Le jour suivant, samedi, nous sommes allés au centre commercial pour y faire du shopping. C'est bien banal, non ? Enfin bon...
À dix heures et des il me retira le collier ainsi que les bracelets des chevilles et des poignets, et il me dit d'aller me maquiller puis d'enfiler les mêmes sandales blanches à talons hauts que j'avais porté le premier soir, et rien d'autre. Je fis comme il m'avait demandé, sans savoir ce qui allait advenir. Puis il me tendit mon manteau fourré. Je me glissai au dedans. Debout derrière moi et m'entourant de ses bras, il me serra la doublure contre la peau nue et me glissa par dessus l'épaule, « Les courses, c'est maintenant. »
« Comme ça !? » dis-je, espérant qu'il plaisantait. Mais non. Doux Jésus ! pensai-je. Il va me trimbaler en public comme ça ! Il ne faisait pas froid, mais j'ignorais si je pourrais supporter ça. C'était fort émoustillant et très excitant sur du papier, - sur la Liste - mais là...
« Ne boutonne pas le manteau, » dit-il. Nous avons marché côte à côte jusqu'à la voiture, mon manteau battant au vent, exposant mon extrême nudité. J'abaissai les yeux sur mon corps. C'en était trop. Je renâclai devant la voiture ; je savais que si j'entrais dedans, je ne pourrais plus rien empêcher. Je restais debout là, indécise, et je l'interrogeai du regard - comme s'il avait pu me dire quoi faire pour résoudre ce problème.
« Tu refuses d'y aller ? » me demanda-t-il.
« On s'était mis d'accord : pas d'humiliation en public, » dis-je, « c'est pas réglo que doive laisser mon manteau ouvert. »
« Si tu fais comme je te dis, il n'y aura pas d'humiliation en public, » me dit-il, en insistant bien sur le mot public. « Tu dois me faire confiance. Est-ce que tu essayerais de marchander ? » me dit-il - avec le même air qu'il avait juste avant de me mettre le bâillon, jeudi dernier.
« Non, » lui répondis-je en panique. « C'est juste que je... je... » J'entrai dans la voiture, en espérant qu'il n'était pas trop tard pour échapper à tout ce qu'il pouvait avoir en tête. Et je savais bien que ça n'était pas rien. Ça ne valait pas le coup de rompre le pacte, ceci dit. Je me jetai à l'eau. Tu dois faire confiance.
Il me dit de remonter mon manteau sur les hanches de façon à ce que ma peau nue s'appuie sur le siège glacé. Je le fis, et je tentais de me l'enrouler afin de rester au chaud. On a réellement été au centre commercial et il est sorti de la voiture, en a fait le tour, a ouvert ma portière et m'a demandé de sortir. Ce que j'ai fait en tenant mon manteau fermé. Puis il m'a dit que je pouvais le boutonner, Dieu merci ! Je jetai un regard circulaire sur l'immense parking et l'océan de bagnoles, il n'y avait personne en vue et je lui dis, « J'ai du mal à croire que je suis en train de faire ça. »
Puis nous le fîmes pour de bon.
Nous pénétrâmes dans la galerie marchande. Je sentais que tous les regards des autres se posaient sur moi, et qu'ils savaient. Il me prit par le bras et me dirigea vers un magasin de vêtements. Nous traînâmes au rayon des robes (il les regardait, et moi je faisais semblant tout en m'inquiétant des gens qui auraient pu me démasquer et que si l'un d'eux s'en rendait compte, il m'arracherait le manteau et me ferait arrêter). Une vendeuse survint, qui me demanda si j'avais besoin d'aide. En fait, j'aurais voulu qu'il réponde à ma place, mais il ne le fit pas. Il furetait dans un des rayonnages. Je balbutiai « j'fais que jeter un œil, merci, » et comme elle s'en allait je me rendis compte dans un frisson débile qu'elle n'avait rien soupçonné du tout. Bien sûr que non. Conne. J avait dégotté une robe à ma taille. Elle était à manches longues et tricotée dans un genre de mohair, à col roulé, blanche, pas tout à fait mini, mais coupée largement au-dessus du genou. Il connaissait ma taille. Il me la tendit et me dit d'aller l'essayer. La vendeuse revint et nous montra la cabine d'essayage.
« Puis-je vous débarrasser de votre manteau ? »
Oh Dieu ! « Non merci, » répondis-je en priant. Avec ferveur.
« Bien, mais faites-moi savoir si je peux vous aider. » MerciMonDieuÔMerci. Je vous jure, si elle m'avait demandé pourquoi je voulais garder mon manteau, je lui aurais répondu : Oh, pour des raisons sentimentales. Je n'arrivais pas à penser à une autre raison. Le vide total. Conne.
Dans la cabine d'essayage, je me glissais hors du manteau et dans la robe ; je la défroissai et puis je me suis regardée dans la glace. Pour moi, cela sautait aux yeux que je ne portais rien en dessous, mais j'ignorais si les autres pourraient s'en apercevoir. La robe était (est) taillée très près du corps. Au moins, je ne pouvais rien voir à travers le tissu. Ou, du moins, je pensais que non. Mes tétons ne sont pas assez sombres pour qu'ils puissent s'entrevoir, et, bien entendu, pas de poils noirs à l'endroit du pubis. Si mes tétons ne se durcissaient pas - ce qu'ils firent immédiatement - personne ne pourrait se rendre compte de rien. Ça me va bien sans soutien-gorge. Ce qui signifie que mes seins ne pendent pas énormément. J dit qu'ils tombent juste comme il faut, va savoir ce qu'il veut dire par là ; j'ai toujours pensé que le MOINDRE pendouillement était déjà de trop, mais il insistait sur le fait que c'était faux. Quelque chose sur leur façon de s'infléchir ou un truc dans le genre, disait-il. Les hommes. J'attendis en me concentrant sur autre chose jusqu'à ce que mes tétons cessent de me faire leur petit numéro.
Je sortis et je fis le mannequin pour J, m'attendant à tout moment à ce que la vendeuse déboule avec un policier : « C'est elle, monsieur l'agent. » Quand elle vint pour de bon, j'eus peur de simplement lever les yeux sur elle, pour le cas où mon air coupable eût révélé mon secret. Pourtant, je ne crois pas qu'elle se soit rendu compte. Son visage resta impassible lorsqu'elle me dit que la robe m'allait très bien, en essayant de faire sa vente. Bien entendu, mes tétons me trahirent immédiatement, érigés et hurlant : « C'est nous ! Regardez ! Oui, là ! Pas de sous-vêt's ! Ameutez la police ! » Elle m'aurait probablement faite arrêter si elle n'avait pas été payée au pourcentage. Elle tapa le ticket de caisse et prit la carte de crédit de J.
« Est-ce que je vous l'emballe ? »
« Euh, » dis-je avec à-propos. Nous autres de l'Indiana sommes célèbres pour notre à-propos.
« Pourquoi tu ne la porterais pas ? dit J... Puis, à la vendeuse, « Pourriez-vous aller chercher le manteau de la dame, s'il vous plaît ? »
Les yeux me sortirent de la tête, et quand elle fut partie, je lui chuchotai furieusement, « elle va voir que je ne portais rien en dessous ! » Il me sourit d'un air innocent. « Il n'y a pas d'autres vêtements dans la cabine ! » lui expliquai-je, pensant qu'il n'avait pas bien saisi, qu'il était la personne la plus stupide sur cette planète. Il souriait bêtement. J'aurais voulu disparaître. Je lui donnai un coup de coude. Il me sourit encore plus largement. Je ne sais pas pourquoi, mais d'une façon parfaitement illogique, mon esprit avait conclu que ça devait être un délit similaire au vol à l'étalage, sauf que là, au lieu de sortir avec trois robes sous le manteau... Enfin quoi, il devait bien exister un règlement imposant de sortir d'un magasin avec un nombre précis de vêtements, non ? J'allais me faire appréhender. « Désolée, madame, mais vous devez quitter le magasin avec un minimum de DEUX robes. C'est la loi. Vous devriez le savoir, vous qui êtes de l'Indiana. »
Quand elle fut de retour avec le manteau et l'air inquiet, il le lui prit doucement et la remercia, me prit par le bras et se dirigea lentement vers la porte. Elle était sur le point de dire quelque chose, mais au lieu de ça elle tourna la tête vers les cabines d'essayage avec un air déconcerté. Je crois qu'elle ne comprenait pas. Comme on dit à propos du Sud, « c'est pas la chaleur, c'est la connerie. » Je crois bien qu'en fait celle-là ÉTAIT réellement conne. Peut-être qu'elle était de l'Indiana. Une autre non-inventrice-de-fil-à-couper-le-beurre.
On l'avait fait ! Mes tétons exultèrent à nouveau. Je lui demandai mon manteau. « Est-ce que tu es sûre de vraiment le vouloir? » me dit-il.
Sûre ? Bien sûr que j'étais sûre. Je lui susurrai, « Je suis toujours nue en dessous, tu te rappelles pas ? » En parlant de conne. Il me regarda sans rien dire. J'ai réfléchi à ce que je venais de dire, et je me suis rendu compte que c'était ridicule. Tout le monde est nu sous ses vêtements. Pour une raison X il me vint à l'esprit l'image de ces panneaux apposés aux portes de certains restaurant avec marqué dessus : pieds nus interdits.
J'ai un corps acceptable, et j'étais déjà sortie sans soutien-gorge avant ça. Et puis au diable ! et pourquoi pas ? Je lui pris le bras, je m'appuyai tout contre lui et nous sortîmes de la galerie marchande en flânant. Et je dis bien en flânant. Je sentais le doux tissu se mouvoir sur ma peau, et l'émotion suscitée par l'idée de ce que je venais de faire me fit me sentir au sommet du monde. Flottante. Un homme accompagné de sa femme me regarda passer et je sus qu'il admirait mon corps, et non qu'il était bouche bée devant une personne nue sous sa robe. Enfin, peut-être bien qu'il y pensait quand même. Sa femme aussi me regardait. Après être sortis de la galerie, je ne pouvais pas croire qu'il faisait vraiment cela. Et puis nous l'avions fait. Et puis je ne pouvais pas croire que nous l'avions vraiment fait. Je n'y crois toujours pas. Mais nous l'avons vraiment, vraiment fait.
Arrivés à la voiture, J me demanda, « tu veux aller déjeuner quelque part ? »
Je le regardai droit dans les yeux et je dis, « Si tu veux, mais ce que j'ai vraiment envie, c'est de rentrer à la maison, de me changer et de mettre mes fringues de tous les jours. » Il sourit, en sachant bien ce que je pouvais porter à la maison, et il ouvrit sa portière, puis la mienne et j'entrai dans la voiture, et là j'ai remonté ma robe jusqu'à la taille sans qu'on me le demande. La deuxième partie du trajet s'effectue sur une petite route de campagne à deux voies. À peine sortis du trafic urbain, j'enlevai ma robe par le haut et je lui dis : « Je voudrais quand même pas que ma seule robe soit toute froissée, non ? » Je fis le reste du trajet toute nue dans la voiture, à côté de lui. Par pure espièglerie.
Et, quand nous fûmes parvenus à la maison (qui est isolée au milieu de quatre hectares de bois) je l'ai laissé à la voiture et j'ai filé vers la maison en rien d'autre que mes chaussures. Je l'ai attendu à la porte pour qu'il l'ouvre. J'étais si pleine de moi.
Conne. Je pense que je vais changer mon nom en
Décidément-non-inventrice-de-fil-à-couper-le-beurre.
Je ne savais pas ce qui m'arrivait. J'étais soudain devenue intrépide, accomplissant délibérément des choses outrancières de mon plein gré, sans qu'on me pousse à les faire. C'était extra. Dangereux, mais sans danger en même temps. Je sentais que je pourrais supporter tout ce qu'il y avait sur la Liste et même quelques trucs en plus qui n'y étaient pas mentionnés.
Dans la maison, il mentionna qu'il avait lui aussi noté qu'un changement s'était opéré en moi. Je lui ai simplement souri et je suis partie chercher mes menottes et mon collier. Je les appelle des menottes, mais elles ne sont pas des menottes, mais des sangles de cuir épais, marron, avec des petits trous pour permettre de cadenasser les boucles. Le cuir avait été un de ses hobbies. C'est vraiment un homme à tout faire : il connaît l'électronique, l'ébénisterie, la menuiserie, la plomberie, la carrosserie (des voitures, des voitures...) et plein d'autres trucs dans le genre. Le garage est un véritable atelier de pro, plein d'outils. Il m'a dit qu'il a rêvé des années durant avant de pouvoir s'offrir un atelier digne de ce nom. Ça doit être chouette d'avoir un vrai salaire après tant d'années d'études et de galères. Les infirmières n'ont pas de vrai salaire. Il n'a l'air vrai que pour les étudiantes.
Je digresse. Après lui avoir amené les bracelets, il m'annonça qu'il avait quelque chose de spécial en tête pour après le déjeuner. Nous avons mangé, moi nue et lui tout habillé, et nous avons laissé la vaisselle en plan sur la table.
« Est-ce que tu crois que ta frime ait pu me faire oublier tes hésitations et tes questionnements dans la voiture, ce matin ? » me dit-il.
« Maintenant tu te passes les bracelets, » dit-il en se dirigeant vers le salon. Il semble adopter ce ton de maître affecté lorsqu'il s'apprête à me faire quelque chose. Comme s'il lisait un script ou quoi. Je courus le rejoindre, bricolant avec les menottes et n'y parvenant pas.
« Je pensais que ça t'aurait fait plaisir, » lui dis-je, « je l'ai fait pour toi ».
« J'ai perçu un peu plus que la simple envie de me faire plaisir dans tes actes. Il y avait de l'orgueil... et un soupçon de rébellion. Tu n'as joué le jeu d'aujourd'hui que pour le gagner. » Il parle réellement de cette façon quand nous... enfin... faisons ce genre de trucs.
« Non, vraiment ! » protestai-je sans conviction. Il me prit la tête entre ses mains et me maintint le visage face au sien pour que je sois obligée de le fixer. Il ne dit rien, n'ayant que l'air sceptique.
Bon, d'accord, alors d'enlever ma robe sans qu'il me le demande, puis de le laisser à côté de la voiture avait peut-être été plus que ce qu'il n'avait strictement requis de moi. « Enfin... c'est possible... » éludai-je, sans l'accepter vraiment, mes yeux fuyant les siens.
« En outre, » dit-il en me relâchant, « tu es restée habillée tout le temps, et être nue dans une voiture aux vitres teintées sur une petite route de campagne ou dans des bois perdus n'est pas chose si osée. Tu sais ce qu'on dit à propos d'un arbre qui s'abat dans la forêt alors que nul n'est là pour l'entendre... » Il avait raison. J'étais courageuse uniquement quand il n'y avait pas de danger. Mais pourtant ça m'avait... excitée.
Je sautillais sur un pied en essayant de le convaincre et de boucler un bracelet autour de ma cheville en même temps. Ça n'a pas marché ; il m'a juste ignorée.
Il me demanda de retirer mes lentilles de contact et d'aller m'allonger sur la table de la salle à manger, puis de l'y attendre. C'est une lourde table de réfectoire en chêne. Le plateau a dix centimètres d'épaisseur et il est taillé d'une seule pièce dans le tronc d'un gros arbre. Étroite et longue, elle pèse une tonne et c'est une belle antiquité. Mon dos la trouva glaciale. Je m'allongeai dessus, jambes jointes, doigts croisés sur le ventre, et j'attendis, comme chez le docteur, les yeux au plafond. Il revint du garage avec une boîte à outils et une corde en nylon souple. Il attacha mes menottes ensemble sous la table avec les coudes rabattus par dessus le rebord. Mes jambes pendaient de part et d'autre du plateau ; elles furent liées de manière similaire, mes pieds étirés jusqu'à presque se rejoindre sous la table par une corde liée à chaque cheville.
J'étais dans une posture fort gênante et disgracieuse. En dépit de la toute récente découverte de mon nouveau sang-froid (lire aplomb) intérieur, ma gêne refit surface. En relevant la tête et en prolongeant mon regard au delà de mon corps allongé, je pouvais discerner mon reflet imprécis dans la grande glace installée près du feu. La table était suffisamment large pour que mes jambes fussent bien écartées, et avec mes coudes repliés sous le rebord du plateau, il m'était impossible de me placer dans une position où j'aurais été en mesure de les rassembler - ce que je désirais à tout prix : bien que je sois notoirement amblyope sans mes lentilles, je savais que la vue était outrageusement, mais alors OUTRAGEUSEMENT gênante, et j'étais outrageusement gênée. Je me sentais bien moins vulnérable et exposée devant mon gynéco.
Il se tenait debout derrière ma tête, il fallait donc que je le regarde dans le miroir ou que je tente de soulever mes épaules et de me tourner sur un côté pour voir ce qu'il faisait. Bruits de ferraille. Grattements métalliques et puis sifflement rauque. Dans le miroir, j'en vis suffisamment pour distinguer qu'il avait allumé un chalumeau !! [Après avoir lu ça, il m'a demandé de corriger et d'écrire une lampe à souder à gaz, comme si de tels détails avaient pu influer sur ce que je ressentais alors.]
« Qu'est-ce que tu vas me faire !? » lui criai-je d'une voix brisée, soudain au bord de l'hystérie. Je n'étais pas absolument certaine s'il fallait que je SOIS hystérique ou pas, mais je n'allais pas prétendre exhiber mon sang-froid s'il avait fondu.
Il me contempla impassiblement, avec un air que je lui avais déjà vu. « Tu n'as pas encore appris ta leçon, pas vrai ? Tu vas devoir apprendre à me faire confiance, » me dit-il, puis il quitta la pièce.
Je lui fais vraiment confiance, mais doux Jésus, un CHALUMEAU ! C'est un truc VÉRITABLEMENT effrayant. J'avais bien le droit d'être rassurée un minimum, non? Et droit à quelque explication ? Enfin, j'avais déjà eu droit à la seule explication à laquelle je pouvais prétendre : « Tu dois me faire confiance. » Je me raccrochais au fait qu'il semblait beaucoup tenir à ce que je lui accorde ma confiance, car dans ma position il aurait pu me faire tout ce qu'il voulait sans problème.
Il revint avec le bâillon et se mit à côté de ma tête. Il me posa la main sur le menton, en maintenant ma mâchoire inférieure.
« Ouvre la bouche, » comme s'il allait m'administrer une cuillérée d'huile de ricin.
« Non, s'il te plaît, ne fais pas ça. Je ne parlerai pas. » J'étais morte de peur.
« Ouvre la. »
« Mais je... »
Il me posa doucement le bâillon sur les lèvres et attendit, patient et implacable. Qu'est-ce que ça pouvait bien faire ? Personne n'aurait pu m'entendre, de toute façon. Je ne pouvais pas me libérer, je n'avais donc d'autre alternative que de coopérer en étant bâillonnée, ou de juste coopérer. Je le fixai un long moment, quêtant le réconfort dans ses yeux, à nouveau légèrement terrorisée. Imaginez Bambi pris dans le faisceau de vos phares : c'est ainsi que je me sentais. J'ouvris ma bouche en grand, en gardant mes yeux rivés sur les siens. Mes lèvres auraient tremblé si le bâillon ne les avait pas comprimées. Il s'immisça. Il ne s'embêta même pas avec la courroie, cette fois. Je ne pouvais pas l'enlever sans l'aide d'une main libre.
Un petit sac pesant fit un plouf en atterrissant sur la table, tout près de ma tête. Je me tordis et je roulai des yeux pour l'apercevoir, les courroies ouvertes du bâillon bloblotant au passage. Il plia une serviette humide et la déposa sur mon abdomen (des Josef Mengele / opérations / scalpels / Charles Manson / morceaux-de-cadavres-retrouvés-dans-les-bois-par-des-campeurs-hystériques flashèrent dans ma petite cervelle. J'ai une imagination déplorable.), et du sac il déversa un petit amas de chaîne dorée. (Je le lui ai demandé plus tard : c'est juste de l'acier plaqué or ; sans quoi elle eût coûté une petite fortune.) La chaîne était en forme de Y, ses trois parties s'y rejoignaient au centre dans un anneau de trois centimètres de diamètre. Il me souleva le bas du dos et y passa la chaîne, puis il positionna l'anneau entre mes reins.
Je n'avais pas les idées très claires, sinon j'aurais dû être soulagée à la vue des chaînes. Il aurait pu s'agir de sacs-poubelles et d'un couteau de boucher. Enfin, connaissant mon J, je n'aurais pas dû avoir peur, mais mon imagination avait passé la surmultipliée.
Il tira sur les extrémités de la chaîne et les fit se rejoindre. Elles étaient un peu lâches et il les ajusta jusqu'à ce qu'il n'y ait plus le moindre jeu, les rattachant à un maillon ouvert de la même chaîne. Avec une grosse pince, il replia le maillon dans sa forme initiale, et ralluma le chalumeau. Je tordis la tête à gauche et à droite, le surveillant de mes yeux écarquillés.
C'est le bruit qui me faisait sursauter. Je n'avais jamais été aussi près d'un chalumeau, et puis les bruits trop forts me font peur. Il pétaradait et produisait un genre de rugissement sifflant. En fait, il n'était pas tellement bruyant, mais que ce rugissement provienne d'une flamme hyper-chaude n'étais pas fait pour me rassurer, croyez-moi. Oh ! il n'avait pas besoin d'un couteau de boucher, il avait un chalumeau entre ses mains. Je suis une sacrée conne. Je peux le dire, maintenant... Et puis j'étais suspendue au fait qu'il se soucie que je lui fasse confiance, alors même que j'étais totalement impuissante et qu'il n'avait aucune raison de tenir compte de moi. D'une certaine manière, cela impliquait qu'il ne trahirait pas ma confiance.
Il reposa le chalumeau sur le couvercle de sa boîte à outils et interposa deux plaques de bois entre la chaîne et mon ventre, en tirant la chaîne par dessus la serviette. Il étala une matière gluante sur le maillon ouvert. Jusqu'à présent, j'observais chaque détail avec beaucoup d'intérêt. Vous pouvez me croire, je faisais très attention. Mais lorsqu'il se pencha de nouveau avec le chalumeau, je ne pus me forcer à regarder, j'avais si peur d'être brûlée. J'avais juste rentré mon ventre pour mieux prier. J'étais soulagée qu'il s'agisse de la chaîne et pas de moi.
Il ne lui fallut pas plus d'une minute pour en finir. Le bruit du chalumeau s'arrêta net. Pendant un temps, le seul bruit de fond fut celui de mon souffle court s'exhalant bruyamment, haletant par mes narines. Mais je ne ressentais pas la moindre chaleur, sans même parler de brûlure. J'abaissai les yeux : J chassait au loin une âcre fumée à l'aide un vieux magazine. Il prit un coin de la serviette mouillée et en tapota le maillon. Pchhhhhht... En quelques coups le chuintement se tut.
Il put bientôt palper délicatement, puis prendre le maillon entre ses doigts. Je me fatiguais à tenir ma tête en l'air pour mieux voir, mais je ne pus m'empêcher d'être fascinée et horrifiée. Je tentai de le suivre des yeux après qu'il eut éloigné le chalumeau et qu'il fut revenu avec une sorte d'énorme machin du genre pince coupante. Il sectionna les maillons superflus de la chaîne aussi aisément que s'il se fut agi d'une brindille. J'étais munie d'une ceinture sans boucle et soudée.
« Soulève ton derrière, » dit-il. Je le fis.
Il tendit sa main entre mes jambes et tira la troisième longueur de chaîne en direction de mes reins. Je la sentis exercer une traction sur la ceinture dans le dos pendant qu'il la tendait.
Il quitta la pièce à nouveau. Il revint en tenant quelque chose dans une main, mais il se replaça derrière ma tête et je ne pus voir ce que c'était.
Tout en maintenant l'objet caché sous le plateau de la table, il se mit debout d'un côté et se tint là. En m'efforçant de soulever mes épaules, je vis qu'il me faisait quelque chose entre mes jambes. Il m'insérait quelque chose dans le vagin ! En me tendant plus encore, je vis du plastique blanc. Je sentais que c'était doux et lubrifié, mais il qu'il m'insérait quelque chose pour de bon ! Je tentais d'y résister en crispant mes muscles et en me tortillant, mais c'était trop glissant et mes jambes étaient bien trop écartées et il insistait bien trop. Ladite chose avait franchi mon péristyle. J'émis des sons par derrière le bâillon. Je ne pouvais l'empêcher d'entrer. Il continua, la glissant plus profondément encore, jusqu'à ce qu'elle soit aussi enfoncée que possible. Elle n'était pas insupportablement énorme, probablement plus petite que celui de J, mais c'était si dur et rigide que je la ressentais comme une énorme intrusion.
Il la retira un peu, puis l'y replongea. Et la ressortit. Bien entendu, il s'agissait d'un gode. Un truc auquel mon esprit du Middle West avait eu quelque problème à s'adapter. J'avais, bien sur, entendu parler d'eux, mais croyez-moi ou pas, je n'en avais jamais vu un en vrai avant ce samedi-là. Où aurais-je bien pu en voir un dans mon trou natal ? Les gens vont à la ville d'à côté pour acheter des capotes. Et les gens de la ville d'à côté viennent chez nous pour acheter les leurs. C'est pas marrant, soit dit en passant. Je vous invite à songer à d'où je viens.
Il le repoussa au dedans, observant mon visage. Il y voyait que je ne réagissais pas sexuellement. Non. C'était trop artificiel, trop pervers pour mon esprit du Middle West. Désolée si je n'ai pas adhéré à la réaction de pute en chaleur que vous aviez espéré de moi, mais c'est comme ça, et toc. Il fit quelque chose avec la chaîne, et boucla son extrémité avec un autre cadenas, encore plus petit et doré que les autres. Bien que très fonctionnel. Mais où donc se procure-t-il tous ces trucs ?
Il revint à ma tête, la souleva gentiment, puis il cadenassa le bâillon. Aussitôt qu'il eut lâché l'engin, je me mis à me tortiller pour essayer de l'expulser. Pas moyen. Puis il me détacha les jambes. Je les élevai au dessus de la table et je les rassemblai délicatement. J'avais un peu plus de liberté de mouvement, mais même, je ne pouvais toujours pas m'en débarrasser. Puis il libéra mes bras. Instantanément, mes mains filèrent entre mes jambes, pour tirer sur la chaîne. À nouveau, pas moyen. J'allais sauter de la table, mais je réalisai vite qu'il fallait que je fasse très attention à mes mouvements. C'était atroce. Ma seule pensée se résumait à : mais que m'a-t-il donc fait ? Mais je le savais déjà. Prudemment, je descendis de la table, et, de mes doigts tremblants, je me palpais pour voir s'il y avait un moyen de me dégager. La chaîne passait dans un anneau au bout de l'... engin. Désolée, mais godemiché sonne si pervers à mes oreilles. Des nazis en chaussettes sales et tout, et tout.
Je fis un pas, pour voir. Je pouvais marcher, mais ni vite ni gracieusement. Je me faufilai doucement vers la chambre pour m'y observer de plus près dans la glace. À nouveau le faciès grotesque, les lèvres étirées, le mascara dégoulinant. Je ne savais pas par quel bout entamer mon angoisse. La chose était un string fait de chaînes. Je me retournai pour jeter un œil par dessus mon épaule. La ceinture était assemblée par un anneau soudé, sis au milieu de mes reins. La chaîne de l'entrejambe était reliée au même anneau. Elle était serrée au creux de ma raie : je la sentais tout contre mon... orifice. [Il est très strict à ce sujet. Anus et trou de cul ne sont pas de mise. Il me fait modifier ce genre de truc tout le temps].
En tirant la chaîne vers le bas, je pouvais l'allonger suffisamment pour... les fonctions corporelles... mais pas assez pour pouvoir retirer l'engin. Pisser devenait potentiellement salissant. La chaîne elle-même est inviolable sans les outils appropriés. Qui, bien entendu... sont bouclés dans le garage... faut-il vous faire un dessin ?
Mes mâchoires commençaient à me lancer, je sortis donc pour aller à la recherche de J. Il revint par la porte latérale après avoir rangé les outils et me dit, - comme si tout était parfaitement normal - « enfile tes chaussures et vas faire la vaisselle. »
Il plaisantait ? Faire la vaisselle ? Dans l'état où j'étais ? Je lui fis les yeux ronds et je me remis à pleurer, ce qui ne fit qu'amplifier la douleur. Mais je fis ce qu'il m'avait demandé : enfiler mes talons-aiguilles, tituber jusqu'à la cuisine et me mettre debout face à l'évier en reniflant, avec le mascara dégoulinant sur mes joues et de la bave plein le menton. Et pas moyen d'argumenter. Je terminais la vaisselle, - il n'en avait pas beaucoup - et je revins au salon en chancelant. Il était debout et regardait par la fenêtre. Il se tourna vers moi.
J'étais debout devant lui, les yeux baissés, esclave obéissante jusqu'au bout des ongles, faisant de mon mieux pour jouer mon rôle comme il le désirait.
« Tu commences à comprendre ? » dit-il.
« Ah, » acquiesçai-je d'un air enthousiaste, sans commencer à comprendre.
« On va voir, » dit-il en jetant un œil à sa montre. Il se retourna vers la fenêtre.
J'allais chercher mon collier avec dans l'idée de le mettre, pensant que ça pourrait le convaincre. Bien sûr que non. Je dus attendre. Je restai là, debout, tentant de focaliser mon esprit pour ne pas laisser ma mâchoire s'endolorir. Le second appareil en moi ne me posait pas vraiment problème si je ne me déplaçais qu'un peu. Je n'avais pas encore dû aller pisser. Il alla vers le fauteuil et s'y assit. Je restai là où j'étais, face à la fenêtre, jambes écartées, fixant le sol, en attente.
En dépit de tous mes efforts, le bâillon s'imposait. C'est lui le pire. Je renonçais à empêcher ma salive de couler partout autour, et je la laissais goutter sur moi et jusque par terre. C'est très dur de déglutir avec ce machin ; j'ai l'impression que je pourrais me démettre la mâchoire. Je me maîtrisai autant que je le pus, mais un sanglot finit par s'échapper de moi. Enfin, c'est né comme un sanglot, mais c'est sorti comme un grincement reniflant. Je l'ai imploré des yeux. Je suis revenue vers lui et je me suis agenouillée à ses pieds en tenant ma mâchoire entre les mains, et ce n'était pas de la frime. Il caressa mes cheveux. Tendrement.
« Tourne-toi, » me dit-il. Je le fis péniblement, toujours à genoux,. Je le sentis m'ôter le cadenas. Mes mains se posèrent sur la boucle de ma nuque en hésitant. Il ne dit rien. Je les ramenai sur les flancs, avec les poings serrés pour tenter de juguler la douleur. Après un temps d'arrêt juste assez long pour que j'admettre avoir reçu un enseignement de plus, il me dit : « enlève-le. » Je le fis. Soulagement.
« Mets-toi debout, » dit-il.
Je me suis relevée en chancelant, mon dos toujours tourné vers lui. Je pensais qu'il allait me retirer l'autre chose aussi, mais il ne me demanda même pas de me retourner. Au lieu de ça, il partit vers la chambre. Je le suivis en silence, sans savoir quoi faire d'autre. En passant devant la psyché, je m'arrêtai. J'offrais un sacré tableau. Le mascara et l'eyeliner mélangés à la salive maculaient mon visage des yeux jusqu'au menton ; ça avait dégouliné sur ma poitrine et jusque sur mes cuisses. J'étais barbouillée de rouge ; sur mon ventre j'avais une tache de ce truc gluant et maronnasse dont il s'était servi pour me souder la chaîne, et mes cheveux encollés par endroits avec d'autres matières poisseuses étaient une gigantesque meule de paille explosée. J'étais debout avec les jambes écartées dans une posture fort peu distinguée. Ma main s'égara sur la chaîne ; je tentai sans conviction de tirer dessus. Aucun espoir. Mes épaules s'affaissèrent. Je vous dis, un vrai naufrage. Et cette chose en moi. Dans le miroir, par dessus mon épaule, je vis qu'il me regardait. Il avait enlevé sa chemise. De mes deux mains, je recouvris ma... nature... et la chose.
« La chaîne autour de ta taille est brasée à l'argent. C'est aussi solide qu'une vraie soudure. Elle est inamovible. » Comme si j'avais pensé le contraire. Ma main retomba. « Viens et déshabille-moi, » dit-il.
C'était quelque chose de nouveau. Rappelez-vous, je ne l'avais pas encore vu tout nu. Je clopinai jusqu'à lui, toujours avec mes mains plaquées sur moi (ne me demandez pas pourquoi, après ce qu'il venait de contempler). Une petite clé en or pendait à son cou. Je me mis à genoux, lui défis sa ceinture, puis son pantalon. Il caressa mes cheveux très doucement, puis me laissa là pour aller s'asseoir sur le lit. Je le rejoignis en marchant à genoux, et j'entrepris de défaire ses chaussures après qu'il se fut allongé. Quand j'en eus fini, je m'accroupis précautionneusement en me recouvrant de mes mains. Sans se relever, il me dit « va faire couler la douche. »
Malgré la vétusté de la maison, la salle de bains de J était vaste et moderne ; un rajout récent, je crois. Elle est bien plus grande que celle de ma chambre. Il y a deux baies vitrées plus une autre dans la douche. La douche est immense, carrelée, avec une porte en verre. Les murs de la salle de bains sont carrelés à mi-hauteur et le reste est stuqué ; il y a une vieille baignoire en fonte à pattes de lion, des toilettes modernes et un lavabo, une petite table et une chaise. Je fis couler l'eau jusqu'à ce qu'elle soit chaude, et je lui annonçai que c'était prêt. Il entra en premier. J'attendis. Il me dit, « enlève tes chaussures et entre là-dedans. » Je le fis, tout en me couvrant le devant. Délicatement, il me lava le visage, la poitrine et le ventre. Je ne pensais pas qu'il puisse être pardonné d'avoir mis cette chose en moi, quelle que soit sa douceur après coup. Je me sentais plutôt confuse, mais j'avais au fond de moi un noyau de rancœur résiduel.
Je me gardais couverte jusqu'au moment où il me tendit le shampoing et que je dusse user de mes mains pour me laver les cheveux. Avec la porte fermée, la douche se transforma vite en bain de vapeur : on y suffoquait presque. Il me demanda de le savonner, mais de fait nous nous astiquâmes l'un l'autre. Après, nous nous enduisîmes du gel-douche auquel j'avais déjà fait allusion plus haut. Vous allez penser que j'ai des actions dans la boîte. Mais c'est un truc super. Nous nous embrassâmes sous la douche avec l'eau, le savon et le gel-douche qui coulaient entre nous, et je le sentis soudain tout dur et tout contre moi. Je me mis à fondre moi aussi, mais cette CHOSE était toujours l'unique objet de ma préoccupation. Je n'allais pas le lui pardonner. Mes yeux étaient posés sur la clé pendue à son cou. Je désirais très fort que cette chose soit hors de moi.
Il m'écarta de la pomme de douche et entreprit de m'étaler du gel sur le devant de mon corps. Il en mit partout, et jusque sur le pourtour de la chose qui était en moi. C'était avilissant qu'il me touche là, dans la situation où je me trouvais. Gênant. Et troublant. Mon cœur se mit à galoper, en partie à cause la chaleur opressante. J'allais m'évanouir. Il me retourna et je plaquai mes mains sur le mur carrelé en écartant les jambes comme pour une fouille à corps. Il me recouvrit les jambes et le dos de gel. Il me massa ensuite des deux côtés, comme il l'avait déjà fait avec le talc. Sa main gauche sur l'endroit lisse et violé par une chose immobile, et l'autre explorant chaque millimètre de mon derrière, se glissant sous la chaîne, se rapprochant pour mieux me tourmenter. À chaque fois qu'il tirait sur la chaîne ou qu'il remuait l'appareil, je ressentais un choc délicieux qui me coupait le souffle, et je faisais un petit « honh ! » Sa main droit s'insinua sous la chaîne, à l'arrière, et tira sur l'engin. Comme déjà plut tôt, je mourais d'envie qu'il me pénètre là. N'importe où. J'enserrai son doigt de mes deux fesses.
Il me hissa à la verticale en m'écartant du mur et maintint mon corps tout tremblant contre le sien, avec son érection poussant contre ma fente postérieure. Il me glissa dans le creux de l'oreille, par dessus mon épaule, « tu aimes ça ? »
« Mmmm, » dis-je, sans vouloir l'admettre, et incapable de dire non.
Il me remit en position contre le mur. Pendant qu'il manipulait l'engin lentement de sa main gauche, un des doigts de sa droite caressait mes arrières, aux confins de la pénétration. Il me reposa la question.
« Oh ! » dis-je, en me tortillant contre sa main, espérant qu'il aurait compris le message. Une chose très audacieuse pour une fille du Middle West.
« Dis-le, » ajouta-t-il, « dis-moi ce que tu veux, » en me pénétrant d'un demi-pouce et tout en continuant à me tripoter.
« Tu ne pourrais pas le dire toi ? » couinai-je.
« Dis-le, » répéta-t-il, en retirant son demi-pouce.
« Oui, » soupirai-je en laissant pendre ma tête entre mes bras. En baissant les yeux, je pouvais voir que sa main gauche me caressait l'entrejambe, et que sa droite était toute prête à me pénétrer.
« Plus fort, » dit-il, « dis-moi ce que tu veux. Tu dois me le dire. » Il continuait à me tourmenter, me caresser et me tripoter. Mes genoux faisaient presque une boucle.
« Je te veux dans moi, » bramai-je. « Je veux que tu me remplisses. » Ma voix se brisa. Avec l'eau, la vapeur, la sueur et le gel, il ne pouvait pas s'apercevoir que je pleurais. Je ne suis pas certaine d'avoir réellement pleuré, mais j'en avais l'envie. Ou, du moins j'essayais. Je sentais que j'aurais dû.
« Où ? » dit-il en insistant.
« N'importe où, » sanglotai-je. « Où tu voudras. Je t'en supplie ! »
« Couvre-moi de gel. » Je le fis avec les mains tremblantes. J'en couvris sa poitrine. La clé n'y était plus. Dans sa main, peut-être ? Quand j'en arrivai à ses jambes, je me mis à genoux et je caressai son membre érigé par dessous et jusque par derrière, et jusque là où il venait juste de (quasiment) me pénétrer. Je n'avais jamais fait cela. Je l'enduisis totalement. Il me guida la bouche vers lui. Le gel avait un goût atroce. Je le rinçai, puis je tentai de le prendre tout entier en bouche ; je me mis à coulisser d'avant en arrière. Je n'avais jamais fait cela à personne d'autre. Je n'avais jamais vraiment voulu le faire, même pour J, bien que je le fisse maintenant. Mais je pense toujours que c'est tellement peu ... enfin, quoi... hygiénique.
Cependant, la propreté de la douche me rendit la chose plus acceptable, cette fois-ci. Je continuais à le caresser d'une main, alors que mon autre rampait à la rencontre de cette chose en moi. Je me masturbai en présence de quelqu'un d'autre pour la première fois de ma vie, bien que la chose introduite en moi fasse quelque peu obstacle. Je crois que l'idée que la pénétration est indispensable à l'orgasme féminin est l'un des grands mythes masculins. C'est faux. Mais il m'est très agréable d'être pénétrée tout en jouissant. Ceci dit j'étais bien trop absorbée pour me rendre compte de ce qui m'arrivait. Je crois qu'il va découvrir tout ça en me relisant. Sans raison apparente, il s'arrêta et me demanda de me relever juste avant que je ne parvienne à l'orgasme.
Il réduisit le jet de la douche à une petite brume aussi douillettement chaude que possible, et la vapeur diminua suffisamment pour que nous puissions tous deux reprendre notre souffle. Il défit la chaîne de ma taille, et, en maintenant la tension sur l'extrémité libre d'une main, il tira lentement sur la chaîne par l'arrière avec l'autre main jusqu'à ce qu'elle libère l'anneau de l'appareil, maillon après maillon, en grinçant, frottant sur mes deux ouvertures à la fois. Je fus plusieurs fois pincée, assez pour me faire hoqueter, mais il me dévisageait de si près et tirait sur la chaîne si lentement et prudemment qu'il en contrôlait chaque pincement, chaque nuance de mes sensations. À chaque fois que ça pinçait, il ralentissait encore pour laisser la douleur se muer en quasi-plaisir.
Après que la chaîne me fut retirée, je me retrouvais pantelante, et presque en état d'hyper ventilation. Il laissa la chaîne se balancer le long de la ceinture, mais il maintint la chose en moi d'une main. Tout doucement, il la retira.
« Vite ! » hurlai-je. « S'il te plaît ! » J'avais envie d'abaisser les mains et de me l'enlever.
Mais il continuait à l'actionner et à caresser mes deux ouvertures. Son autre main, lubrifiée par le gel, me travaillait le derrière, le pénétrant légèrement, s'interrompant, puis le pénétrant à nouveau un peu plus à chaque fois, pendant que la chose continuait son ouvrage par devant. Finalement, il retira l'engin d'un seul coup et il me mit à me travailler de sa main. J'allais avoir un orgasme, et je ne parvenais plus à me tenir debout. Je m'effondrai un peu ; il me soutint en me tenant par les deux côtés de mon entrejambe épilé, comme s'il pour me bercer entre ses mains, alors que je tombais sur mes genoux.
Les mains toujours au mur, j'étais agenouillée et ses doigts se remirent à l'œuvre. Finalement, un de ses doigts me pénétra entièrement par derrière. Je me contractai en me pressant tout contre lui, mais il insistait, continuant à me sonder et à me stimuler. Je n'en pouvais plus, et je commençai à me contracter des deux ouvertures pour contrer l'assaut de ses doigts. Je n'arrivais pas à jouir. Je devins de plus en plus frénétique et convulsée. J'étais si près du but. Son doigt postérieur m'abandonna. Puis il revint, mais ce n'était pas son doigt.
C'était chaud ; je pensai tout d'abord qu'il s'agissait son membre en érection, et je fis en sorte de me détendre pour l'accueillir. Mais non. Il m'insérait l'engin, encore tiède de ma propre chaleur, et cette fois il tâtonnait pour trouver mon ouverture postérieure et, avec l'aide de Dieu, je me relâchai et m'ouvris plus grande pour l'aider, bien que je sache ce que c'était. Je l'admets maintenant, je prétendis que je n'avais de prime abord qu'à demi-cru que c'était lui qui entrait en moi et non cette... chose. Toutefois, quand il fut tout à fait au fond, je me rebiffai. Il me distendait trop fort. J'essayais de le repousser, de l'expulser, n'importe quoi mais m'en débarrasser. Mais je ne pouvais pas. Il retint la chaîne d'une main alors que je tentais de ramper au loin, et me mit à plat ventre de force sur le sol de la salle de bains. Je glissais en avant sur le ventre en me tortillant dans tous les sens, mais je butais contre le mur de la douche ; avec ma tête tournée sur le côté et une joue sur le carrelage, je ne pouvais aller plus loin.
Lentement, doucement et inexorablement, il continuait.
Je sentais qu'il était énorme. Je ne sais pas si on vous a déjà fait ça, mais cette première fois me causa un certain choc. Je savais, par la façon dont je l'avais senti dans mon vagin, qu'il était plus petit qu'il n'en avait l'air, mais il était si dur, si rigide. Il me distendait terriblement, et il semblait tellement plus gros que dans mon autre orifice. Le gel le lubrifiait encore, mais, même de très loin, je n'avais jamais fait un truc pareil.
Ça m'obligeait à m'ouvrir, ça me violait, m'emplissant encore plus alors que j'étais déjà si pleine. J'était prête à exploser, dans tous les sens du terme. Je le suppliai de s'arrêter. Je ne sais pas s'il l'aurait fait, si j'avais été plus sincère. Je me sentais pas mal sincère. Il y avait encore en moi une petite part de curiosité et d'excitation, mais ce n'était qu'une toute petite part.
Je lui dis que j'étais prête à faire n'importe quoi pourvu qu'il me le retire, mais finalement, plutôt que de lutter contre, je me mis à le trouver moins douloureux, ou bien que je le tolérais mieux, - une de ces deux idées, en tout cas - si je me détendais pour coopérer avec J. Et ça continuait. Et, en me relâchant, je me sentis tout simplement emplie et pénétrée. J'arrivais à l'accepter et à me couler dans la sensation, si ce n'est d'y prendre plaisir. Il fut si prévenant que je me sentis mieux. Bien mieux. Finalement, je me frottai le ventre contre le sol de la douche, tentant désespérément d'atteindre mon orgasme.
« Remets-toi à genoux, » me dit-il. J'eus bien de la peine à le faire, mais quand j'y parvins enfin, l'appareil continua sa pénétration jusqu'à ce qu'elle fût totale. Ma main revint brièvement à mon entrejambe, peut-être pour me masturber encore, peut-être aussi pour sentir ce qu'il m'avait fait, je n'en suis plus très sûre. Un peu des deux. Il me demanda de garder les mains au sol. Je le sentis passer la chaîne dans l'anneau à l'extrémité de la chose.
« Mets-toi à cheval sur moi, » dit-il en s'allongeant sur le dos et en se glissant sous moi. Il tenait le bout de la chaîne par dessous en retenant la chose au fond de moi, alors que je passais mes jambes par dessus ses hanches et que je me m'installais à califourchon sur lui, sans toutefois placer son érection en moi. Très lentement, il me retira la chaîne une fois encore en la faisant glisser entre mes lèvres gonflées, en laissant chaque maillon cliqueter sur l'anneau de l'appareil. En même temps il me caressait par devant. C'était dément. Quand la chaîne fut extraite, je ne pus me résoudre à patienter plus longtemps et je descendis sur lui pour l'englober, le poussant profondément en moi d'un seul mouvement coulé.
J'étais couchée sur lui, le plongeant frénétiquement en moi, me broyant contre lui. Il me laissait faire tout le travail. L'eau de la pomme de douche tombait sur nous et dégoulinait de mes épaules à mes genoux ; le bout de la chaîne se balançait entre mes jambes en cliquetant sur le carrelage. Il saisit l'anneau à la base de la chose protubérante, et commença à pomper en douceur en rythme avec mes propres mouvements. Il capta le tempo graduellement, poussant avec ses hanches. Je ne suis pas très bruyante en temps normal, mais là, mes ululements et mon halètement résonnèrent dans la douche, et je fus tout d'abord tentée de pousser le jeu un peu plus, mais au moment même où j'approchais de mon premier orgasme, - qui commença dès qu'il eût commencé à remuer ses hanches - je me mis à crier pour de bon. Sur les carreaux de la douche, mes cris me semblèrent encore plus forts.
Mon deuxième orgasme survint presque tout de suite après - une longue et frissonnante continuation du premier. Être pénétrée deux fois et de cette manière, c'est quelque chose d'indescriptible. Quand il atteignit son orgasme, et moi mon troisième, j'ai songé au fait que je venais de jouir dans chaque trou. Est-il donc possible d'avoir un triple orgasme simultané ? C'est un peu comme une de ces figures qu'exécutent les patineurs ou les plongeurs olympiques. Bon, je ne sais pas ce qu'en disent les spécialistes, mais je crois bien qu'on a obtenu rien que des 10, et même de la part du juge Est-Allemand...
Après mon troisième orgasme, je restais allongée là, incapable de me mouvoir, pantelante, avec le bruit de l'eau qui me chuintait dans les oreilles. Il commença à me retirer la chose. Immédiatement, j'eus un hoquet et je réagis par un quatrième orgasme convulsif, au delà de tout contrôle. Il dura tout le temps qu'il prit à se glisser au dehors. Il me torturait. Il tirait un petit peu dessus et secouait ses hanches, et je ne pus m'en empêcher ; j'étais prise de spasmes et de convulsions au moindre de ses mouvements. J'étais absolument épuisée, incapable même de fléchir mes cuisses comme je le fais normalement quand je jouis. Faiblement, j'essayais de lui dire plus jamais ça, mais j'étais trop affaiblie pour l'exprimer à cause mes spasmes. Ça fit juste un Hon en franchissant mes lèvres.
Enfin, je sentis avec gratitude le reste de la chose glisser hors de moi. Je me sentis rétrécir jusqu'à la normale et, trop faible même pour palpiter en réponse à sa stimulation finale, je vins à bout de mon dernier orgasme.
Quand j'eus suffisamment récupéré pour supporter d'être bougée, il m'aida à me remettre sur le dos et, une fois de plus, il me lava. Il coupa l'eau et s'agenouilla près de moi. J'étais allongée sur le dos quand le dernier fond d'eau gargouilla dans la bonde, tout à côté de moi. La douche était redevenue silencieuse, hormis pour quelques gouttes qui tombaient encore. Je vous jure que je ne pouvais pas remuer d'un pouce. J'étais là, comme une flaque de gelée toute rose alors qu'il m'étalait encore plein de gel sur ma peau rougie. À nouveau, il m'enduisit entièrement, n'omettant rien, pas le moindre repli, des orteils jusqu'à la naissance des cheveux. Puis il me remit en position assise. La vapeur était quelque peu retombée quand il ouvrit la porte de la douche ; l'air froid remplaça la chaleur, mais j'étais toujours incapable de me mouvoir. J'étais assise, les yeux clos, la tête en arrière, appuyée contre le mur de la douche, incapable de me redresser. En me passant ses mains sous les aisselles, il me releva. Je ne pouvais me tenir debout. Enfin, j'aurais probablement pu, mais j'étais vraiment chancelante. Il m'appuya contre le mur de la douche ; ma chaîne avait glissé sur le côté et sa partie libre se balançait sur ma hanche. En me laissant s'effondrer dans ses bras, il me porta dans la chambre et m'assit sur le rebord du lit. Je me laissai immédiatement tomber lourdement sur le dos.
Pendant que j'étais couchée là, il entreprit de me sécher, non pas à l'aide d'une serviette, mais au sèche-cheveux. Je me souviens vaguement avoir pensé que c'était bizarre, mais je n'ai rien dit. Le bruit de la machine couvrait tout de son bourdonnement, et je partis à la dérive vers le sommeil. La dernière chose que je me rappelle, c'est d'avoir été doucement retournée, et la sensation de ses doigts dans mes cheveux quand il a commencé à les sécher.
Quand je m'éveillai, il faisait noir. Je dérivais en sens inverse pour retrouver mes sens : je n'ai pas le sommeil très profond quand je sieste dans l'après-midi. Il m'avait recouverte d'une couette, et j'étais nue sous le coton tout doux. Ma peau était incroyablement douce : j'avais l'impression d'être couverte de satin partout. D'avoir été séchée à l'air chaud m'avait tout enrobée de gel. Je ne peux décrire le sentiment jouissif de s'éveiller ainsi, absolument crissante de propreté tout partout, chaude, sèche, d'une douceur lisse et satinée, les muscles un peu douloureux, comme si j'étais sortie d'une séance d'entraînement au club de gym... le paradis.
Je pris plus de temps qu'il n'en faut pour me lever, en me dorlotant dans le doux luxe du lit, à me remémorer les heures précédentes. Je ressentis un picotement d'excitation à laisser mon esprit errer nonchalamment sur ce qu'il venait de me faire. Non. Je ne le pourrais plus, pensai-je. Pas ce soir, quoi qu'il en soit. En aucune façon. Absolument, positivement... probablement... pas.
Je me suis redressée lentement, d'abord en m'étirant, puis je me suis assise au bord du lit et j'ai rassemblé mes pensées. J'ai entendu des bruits à la cuisine. Il bricolait un truc à manger.
Il m'avait réduite à une flaque de protoplasme surexcité, il m'avait avilie, humiliée, et il m'avait fait admettre que j'en avais envie. Et puis il avait fait un autre travail d'orfèvre en me ramenant à moi après coup. La seule chose qu'il fasse mieux qu'une blessure, c'est le pansement.
Je me levais pour m'observer dans la glace. J'étais plutôt pas mal. Un peu pâle, peut-être. J'avais l'air (et je me sentais) comme une des victimes de Dracula : pâle, faible, usée, du genre éthéré, mais je n'avais pas l'air fatigué. Et mes cheveux formaient un nuage colossal et crépu sur ma tête ; de les avoir séchés sans les brosser avait créé une boule rêche à l'afro. Et pourtant, j'avais l'air super. Même sans maquillage. Il avait rebouclé la chaîne, mais cette fois sans rien me mettre en moi. Ça faisait vachement bien, aussi.
La tenue en coton blanc très ajustée était étalée sur le lit. Je l'enfilai par dessus la chaîne, passai des sandales aux pieds, et j'en vérifiai l'effet dans la glace. Je déambulai, presque en état de rêve, jusqu'à ma chambre pour y chercher mon petit collier en or, et la sensation du coton propre et doux sur ma peau satinée était titillamment jouissive. Sérieusement, ce gel conditionneur est un truc génial si l'on sait en abuser à bon escient.
[Une Note venant du Futur :
[Grâce au miracle du traitement de texte, vous pouvez vous projeter dans le temps directement à la fin de ce récit ; cela fait un mois que ça dure, maintenant, bien qu'il me semble que ça fasse une vie. Après m'être relue, je me rends compte que c'est là que tout a basculé. Inconsciemment (peut-être pas si inconsciemment que ça) j'avais décidé au moment précis que vous venez de lire que j'en voulais... enfin quoi... encore plus. De temps à autre, nous avons continué à faire l'amour d'une façon que je qualifierai de normale. Mais je sais bien maintenant que cette façon de faire l'amour me laissait insatisfaite. Il y avait eu deux années de sexe normal avant que nous quittions Chicago. Je pensais y avoir pris plaisir. Ce fut le cas. Je suis sûre que ce fut le cas. Il était un amant sensible et prévenant, et un merveilleux compagnon dans la vie de tous les jours. En fait, j'avais plusieurs orgasmes quasiment à chaque fois que nous faisions l'amour. Un record pas si risible que ça si l'on en croit la presse féminine.
[Mais s'il me fallait revivre ces journées maintenant, ça serait comme un régime de riz au lait après avoir pris goût au steak tartare. J m'avait aiguillé sur une voie dont je sais maintenant qu'elle est à sens unique, bien qu'alors j'étais certaine que je pouvais - voulais - tout arrêter et revenir en arrière. Graduellement, et par petits pas très chorégraphiés, il me força (guida ?) tout d'abord à me faire reconnaître que j'étais fascinée et émoustillée comme une écolière dissipée par les choses qu'il me faisait, et ensuite à les aimer, de façon à ce que je doive me justifier en prétendant qu'il s'agissait simplement de sexe sophistiqué. Mais je suis parvenue bien au-delà de tout ça. Je reconnais avoir un besoin proche de l'addiction. J'ai lutté contre, pour en être sûre, mais j'ai lutté surtout parce que la résistance fait partie du processus plutôt que d'être une tentative pour en en venir à bout. Il y a quelques jours j'ai voulu lui donner mon absolue et totale acceptation de son contrôle sur moi. Du moins jusqu'à nouvel ordre.
[Ce week-end il y a un mois n'était que le premier pas vacillant d'un bébé dans les bois. Un bébé avec un long chemin à parcourir.
[Le mot esclave sonne si théâtral et si faux, et presque toute la littérature sur le B/D, S/M, etc. que j'ai lu depuis le fait sonner si puéril et sinistrement terrifiant à la fois et, enfin quoi... pornographique, et autant je me refuse à être assimilée avec ce genre de mode de vie, il faut que je vous dise : si je ne fus pas une esclave au sens littéral du terme (c'est-à-dire, une bonniche, ce que je ne suis pas), je fus pour le moins une Accro auto-avouée, volontaire et incurable. Je veux (et voulais) plonger là-dedans la tête en premier, oublier toute prudence et devenir la propriété d'autrui. Je voulais savoir ce que cela faisait que tout abandonner pour cela. N'y a-t-il donc pas une sorte de liberté à tout abandonner ?
[Mais pourtant il y avait un ver assoupi, tapi à la base de mon addiction, et alors que cette addiction se métamorphosait en mode de vie, le ver vint à s'éveiller, et une dualité se développa au sein de ma personnalité. J'ai réagi aux événements que vous venez juste de lire (et à d'autres similaires) de deux façons mutuellement contradictoires ; je voulais une revanche, et je voulais me soumettre. J'en désirais encore plus, de ce traitement dégradant auquel j'avais eu droit ; j'étais fâchée du fait qu'il ne puisse se prolonger - puisque J s'en tient résolument à la limite d'un mois de temps. Puisque la Liste était un contrat, elle me donnait droit à une revanche équivalente, et plus il me ferait de choses, plus douce serait ma vengeance, je pensais. Mais je désirais le traitement auquel j'avais droit, aussi. J'ai fini par en mendier plus et, au final, la revanche ne fut plus ma préoccupation première. Elle ne l'aurait peut-être jamais été si J n'avait pas arrêté la Colonne Un de lui-même. J'aurais outrepassé la Liste, et je l'aurais outrepassée aussi longtemps que J l'aurait désiré. En fin de compte j'avais envie d'aller plus loin que lui. Je crois que ça l'a troublé, comme s'il avait créé un monstre.
[Et il l'avait créé. Je m'étais dit que mon motif de revanche était qu'il me rembourse pour ce qu'il m'avait fait. Je m'étais bernée. Ça s'est fini avec moi comme une sale mioche, désirant le punir pour s'être ainsi arrêté, en réalité parce qu'il s'en était tenu au contrat. Si jamais j'arrive au bout de tout ça (Colonne Deux), je le punirais autant pour s'être arrêté que pour ce qu'il m'a fait avant de mettre un terme à la Colonne Un.
[En écrivant ces mots je suis parvenue au moment où je dois me décider à aller encore plus loin ou pas ; j'ai relu les parties les plus anciennes de ce récit pour m'aider à me décider (et aussi parce que ça m'allume de le relire), mais je saisis cette occasion pour vous mettre un peu au courant, afin que vous compreniez mieux ce qui va suivre, du moins tant que je pourrais comprendre moi-même. La plupart des justifications, des excuses, et des explications de que vous allez lire vous pèseront autant que le tombereau pour un bœuf : l'auto-justification superficielle d'une fille pudibonde de l'Indiana du sud qui comprends moins ses motivations profondes qu'une chienne en chaleur. Vous, habitués de l'ASB (oui, je suis une lectrice d'ASB maintenant, dans le futur), vous comprendrez ma désillusion et ma déception. Vous êtes probablement là depuis plus longtemps que moi). Oh ! les faits sont patents ; ce que vous lisez n'est pas une fiction : c'est arrivé tel que c'est écrit. Théâtralement embelli, certes, et les dialogues ne sont peut-être pas textuels, mais tout est fondamentalement vrai, cependant. Mais les commentaires psychologiques ne sont, pour la plupart, rien d'autre que les illusions d'une mentalité d'écolière qui s'est sentie bien plus en sécurité en s'ancrant fermement dans les bêtises de l'adolescence qu'en se lançant dans les eaux troubles de l'introspection et de la croissance. Comme si j'avais eu le droit de m'arrêter de grandir après mes années de lycée.
[Mais d'un autre côté, j'en tire un bénéfice : maintenant, je suis une personne différente, en déroulant cette petite fable à l'envers, et j'en connais le dénouement, ou, du moins, je sais comment s'achève la Colonne Un. Cette dualité qui s'est développée en moi signifie qu'il existe deux fils conducteurs : ils semblent incompatibles, mais croyez-moi : j'étais - et je suis - sienne. Il me possède complètement. MAIS. Puisqu'il insiste pour en finir avec son tour, j'ai envie que mon tour vienne, moi aussi. Je suis tentée. Je suis sûre que je serais bonne en dominatrice - dans un sens technique. Peut-être même meilleure que J.
[Après tout, je suis une infirmière diplômée.
[C'est un sacré dilemme : je ne veux changer ni son statut ni le mien. Intervertir les rôles pourrait détruire l'image que j'ai de lui en tant que dominant et je ne suis pas sûre de vouloir le faire. Mais j'ai une option, grâce à notre accord au sujet de la Liste.
[En tout cas, ce moment précis de la narration forma le point d'appui sur lequel se basèrent tous les événements ultérieurs, et les embranchements qui m'amenèrent à mon indécision actuelle. Passé ce point, et aussi précisément que je puisse l'estimer, je n'eus plus envie de revenir en arrière, je n'eus plus le désir de me défaire de mon nouveau psychisme. Encore un autre cliché, mais je crois m'être découverte. Je déteste quand on peut tout réduire à une formule et que cette formule se révèle être un cliché.
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